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Lettre Ouverte aux responsables politiques et parlementaires français

Vu l'implication de la France dans le processus en RDC avec le nombre le plus élevé des militaires au sein de l'Eufor, nous avons décidé d'adresser ce lundi 23 octobre 2006 par voie postale, une lettre ouverte aux présidents et responsables des partis politiques français représentés au parlement pour les sensibiliser au danger de guerre qui guette la RDC à l'issue du deuxième tour des élections présidentielles du 29 octobre 2006.

Les incidents et les actes d'intolérance se multiplient à travers le pays alors que des préparatifs de guerre se poursuivent inlassablement sous les yeux et la barbe de la Monuc et de l'Eufor. Le peuple congolais a déjà payé un lourd tribut dans les conflits armés et ne veut plus sacrifier d'autres vies humaines.

Messieurs ,

•  Dominique DE VILLEPIN, Premier ministre

- Michel ALLIOT MARIE, Ministre de la défense

- Philippe DOUSTE BLAZZY, Ministre des Affaires étrangères

- Nicolas SARKOZY, Ministre de l'intérieur et Président de l'UMP

- Bernard ACCOYER, président du groupe UMP à l'Assemblée Nationale

- François HOLLANDE, Secrétaire Général du Parti Socialiste

- Jean-Marc AYRAULT Président du Groupe PS à l'Assemblée Nationale

- François Bayrou, Président de l'UDF

- Hervé MORIN,Président du Groupe UDF à l'Assemblée Nationale

- Marie-Georges BUFFET, Secrétaire National du Parti Communiste

- Alain BOCQUET, Président du Groupe PCF à l'Assemblée Nationale

- Noël MAMERE, Député Verts

- Christiane TAUBIRA, Députée du PRG

Objet : Lettre Ouverte sur la situation politique en République démocratique du Congo

Chers Responsables politiques et parlementaires français ,

La République démocratique du Congo, deuxième pays francophone du monde traverse une étape importante de son histoire avec le deuxième tour des élections présidentielles prévues ce dimanche 29 octobre 2006. La France prend activement part au processus en cours avec plusieurs centaines de militaires envoyés par le gouvernement dans le cadre des forces d'observation de l'Union Européenne (EUFOR) dirigées par l'Allemagne.

Comme vous le savez, dans un passé récent, la France et ses forces armées ont été accusées à tort ou à raison d'être impliquées dans le soutien direct à des régimes répressifs ou des monarchies dictatoriales au Togo, au Tchad, au Rwanda, au Congo, au Gabon et même en République démocratique du Congo alors ex-Zaïre. Les élections en RDC sont destinées à mettre fin d'une part à la dictature monarchique des Kabila qui avait elle-même succédée à la dictature constitutionnelle du Maréchal Mobutu et d'autre part à une série de conflits armés qui a provoqué la mort de plus de 4 millions de congolais en 5 ans (1998-2002). Le rôle de la France, pays des droits de l'homme devrait être au bout du processus, celui de garant d'un changement véritablement démocratique.

Or, ce rôle ne semble pas aujourd'hui perçu comme tel par la population congolaise de la diaspora ou de l'intérieur, qui soupçonne au contraire la France d'être complice d'une mascarade électorale destinée à entériner la continuité de la monarchie dictatoriale des Kabila.

A l'issue du premier tour des élections, plusieurs irrégularités et fraudes organisées par le pouvoir en place avaient été relevées notamment par la respectueuse fondation CARTER et certains observateurs européens. La proclamation des résultats prévoyant un 2è tour avait même provoqué un affrontement armé entre la garde prétorienne de Kabila et celle de son Challenger Jean-Pierre Bemba en pleine ville de Kinshasa mettant la vie de 14 ambassadeurs étrangers en danger (dont ceux de la France, des USA, de la Grande-Bretagne, de la Chine, de la Russie et des représentants de l'ONU et de l'Union Européenne). Alors même que Monsieur Kabila était au courant de la présence de ces diplomates en service à la résidence du Vice-président Bemba, il a pris la grave décision d'ordonner à sa garde prétorienne d'attaquer celle-ci à l'arme lourde et de déclencher un affrontement qui a duré 3 jours et entraîner la mort de plusieurs dizaines de civils.

Depuis, la mission des Nations Unies en RDC, l'Eufor et les ONG nationales et internationales ont fait état de livraison des chars de combat et des munitions à la garde de Monsieur Kabila en dépit d'un embargo international sur les armes en RDC. A quelques jours seulement du deuxième tour des élections, le président Kabila vient de nommer en violation de la Constitution de la troisième république, plusieurs Généraux proches de lui à des postes stratégiques, notamment au ministère de l'intérieur et de l'ordre public et à la tête de la ville-capitale de Kinshasa. Des informations font aussi état de préparatifs de guerre dans le camp de son challenger Bemba. Tout ceci se déroule au vu et au su des forces de l'ONU et de l'Eufor.

Chers Responsables politiques et parlementaires ,

Comme vous le savez ou avez pu le constatez, la situation est plus que préoccupante car, alors que les élections du 29 octobre devraient consacrer la paix, elles risquent de déclencher plutôt une guerre civile. Depuis le lancement de la campagne électorale, plusieurs actes d'intolérance et d'intimidations de l'adversaire sont dénombrés et la tension est à son comble. La vie des millions de congolais, mais aussi celle des militaires français et autres forces engagées en RDC, sont en danger car contrairement au Togo et au Gabon où les oppositions ne disposaient pas des forces armées, le challenger de Kabila dispose de plusieurs milliers de militaires armés qui se sont opposés à ceux de Kabila le 20, 21 et 22 août à Kinshasa. La population congolaise qui a payé un lourd tribut de l'agression menée par le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi soupçonne la communauté internationale de vouloir imposer à tout prix Kabila notamment à cause des prises de positions publiques et imprudentes de certains diplomates (pourtant tenus par le devoir de réserve) en sa faveur. L'amalgame entretenu par le fait qu'aucun gouvernement n'ait condamné vigoureusement l'attaque de la résidence de Bemba alors même que la vie de leurs ambassadeurs était mise en danger a renforcé ce sentiment chez une partie de congolais.

Pour éviter un nouveau drame à ce peuple qui a déjà subi trois décennies de dictature répressive de Mobutu, une décennie de monarchie dictatoriale sanguinaire des Kabila marquée par des guerres d'agression et de rébellion, il est plus qu'urgent que les forces françaises qui sont en RDC tirent les leçons du piège de la Côte-d'Ivoire et du Rwanda pour s'impliquer de façon neutre dans la sécurisation du déroulement des élections. Seules les élections réellement libres, transparentes, démocratiques et indépendantes dépourvues de toutes fraudes telles que constatées au premier tour (doublement des cartes électorales, trafics des procès-verbaux, manipulations des bulletins de vote, bourrages d'urnes, manipulation des résultats) garantiront la paix civile et éviteront un nouveau départ massif de congolais vers l'exil.

Chers Responsables politiques et parlementaires ,

Si les forces françaises, à travers l'Eufor, devraient se retrouver au cœur d'un conflit armé, ce qui n'est pas notre souhait mais risque tout de même d'arriver au regard des éléments d'analyse en notre possession, il est souhaitable qu'elle soit du côté de la légitimité populaire, de la défense des droits et des valeurs démocratiques et non du côté de la continuité d'une monarchie dictatoriale qui est prêt à tout pour se maintenir au pouvoir, ni du côté d'un coup de force illégal.

Dans l'espoir que vous serez sensibilisés par l'objet de notre lettre et que vous lui réserverez une attention particulière, car il en va de la vie des civils congolais, et des militaires français qui risquent de verser leur sang dans un conflit dont ils sont étrangers ; je vous prie d'agréer, chers Responsables politiques et parlementaires, l'expression de notre plus haute considération.

Fait à Paris,

Jean-Paul MOPO KOBANDA

Le 19 octobre 2006 Juriste Congolais
mokob@yahoo.fr


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