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INTERVIEW AVEC LE PASTEUR KUTINO FERNANDO, INITIATEUR DE L'OPERATION "SAUVONS LE CONGO"

Le Révérend Pasteur Kutino Fernando répond à nos questions. Il parle de l'opération " Sauvons le Congo " qu'il a initiée et de son exil en France.

Président de la Mission Mondiale Message de Vie , un ministère d'évangélisation basé à Kinshasa en République Démocratique du Congo, le pasteur Kutino Fernando est bien connu des congolais pour ses prédications à la télévision. Il est également connu comme un personnage assez controversé. Il fut arrêté sous le régime du président Mobutu pour trafic illégal d'armes, allégation qu'il traite de machination, et sous le régime du président Laurent Désiré Kabila pour avoir brûlé ce qu'une opinion a présenté comme une copie du livre saint islamique, le Coran mais qui n'était en réalité, d'après lui, qu'un cahier contenant des prières " magiques ". Vers la fin du mois de mai de cette année, il a initié une opération dénommée " Sauvons le Congo " . Avec l'agitation provoquée par cette opération et son caractère traité d'insurrectionnel dans certains milieux proches du pouvoir, le pasteur Kutino a dû quitter le pays pour la France où il vit ces jours-ci en exil. De Paris, nous l'avons contacté pour en savoir un peu plus sur l'opération " Sauvons le Congo ", sa vie en exil, et ses projets d'avenir. Suivez l'interview.

Congo Vision : Qu'êtes-vous devenu depuis le début de votre exil provoqué par l'opération "Sauvons le Congo" que vous avez initiée?

Pasteur Kutino : je suis toujours l'Archbishop KUTINO Fernando, apôtre de Jésus-Christ par la volonté de Dieu le Père. Je suis toujours Congolais et je demeure une idée pour le Congolais afin de conscientiser mes frères et de les libérer d'entre les mains de toutes les personnes qui projetteraient un hold-up sur le patrimoine congolais et qui voudraient sacrifier le peuple sur l'autel des intérêts égoïstes.

Je suis toujours l'homme qui a eu un rêve pour un nouveau Congo libre , prospère et pacifique.

C'est peut-être la forme de mon combat qui a changé, par la force des circonstances, mais « Sauvons le Congo » se porte bien, comme vous pouvez le constater. Vous le savez, il n'a pas fallu un mois pour que le peuple congolais au pays se reconnaisse dans ce que nous faisons. Dieu a sans doute voulu que je quitte momentanément la RDC pour que le message parvienne aussi aux Congolais de la diaspora et aux hommes de bonne volonté d'Outre-mer. c'est ce qui se fait pour l'instant.

Aujourd'hui, Sauvons Le Congo s'est solidement implanté à l'étranger et la diaspora congolaise continue massivement d'y adhérer.
Une chose est vrai: le Congolais d'aujourd'hui est différent de celui d'hier.
Car je suis admirablement surpris que les Congolais de la diaspora soient si déterminés à remettre les choses en ordre dans leur pays d'origine.
j'ai rencontré tous ces groupes en Belgique, en France et en Grande-Bretagne et ailleurs ; la grande majorité se réclame du mouvement Sauvons Le Congo.
J'ai été très heureux de les rencontrer tous et de m'entretenir avec eux des problèmes qui minent notre pays la RDC.

Congo Vision : L'opération "Sauvons le Congo" a été lancée fin mai - début juin 2003, c'est-à-dire bien après la signature de l'Accord global et inclusif en Afrique du Sud et bien après la promulgation de la Constitution de transition. Apparemment, une telle opération aurait dû être initiée bien avant cette période au moment où des milliers de Congolais perdaient leurs vies à cause de la guerre au pays. Pourquoi avoir attendu juin 2003 et quel était l'objectif visé par "Sauvons le Congo"? Une certaine opinion a semblé lire une motivation politique dans votre action.

Pasteur Kutino : Malheureusement, vous me faites penser encore à tous ceux qui parlent de notre mouvement sans bien le connaître et même sans avoir pris le temps de consulter notre site afin d'acquérir toutes les informations qui s'y réfèrent.

Notre mouvement a théoriquement été inspiré par l'Accord en question et il perdrait tout son sens si ce dernier n'existait pas.
En effet, l'Accord global et inclusif ainsi que la Constitution du 4 avril 2003 étaient, au moment de leur adoption, perçus à juste titre par les Congolais comme une richesse politique et juridique ; ainsi qu'une voie de sortie honorable mettant fin à la guerre.

Or, souvenez-vous qu'entre l'adoption officielle de l'Accord et de la Constitution et la naissance de Sauvons Le Congo,  il a été observé de fortes hésitations, des faux-pas, des réserves et des volte-face préméditées de la part des signataires qui ont fait craindre que ces deux précieux textes ne s'appliqueraient pas, à moins d'une pression venant de quelque part… Pour preuve, la première institution de la transition à avoir été nommée est le gouvernement, le 30 juin 2003, et installée en juillet, soit plus de trois mois après la promulgation de la Constitution… Et pendant ce temps, que devenaient les espoirs du peuple ? Simplement ballottés au gré des alliances contre-nature, étouffés par un système sécuritaire anachronique, foulés aux pieds par les appétits prédateurs issus de tous bords…

C'est pendant ces moments d'espoirs mêlés de doutes, de déceptions et d'inquiétudes qu'est intervenu Sauvons Le Congo. Le but était simplement de former un groupe de pression populaire et efficace dont l'objectif final était d'amener tous les protagonistes de la crise congolaise à respecter leurs engagements pris, selon leurs propres termes, au nom du peuple congolais. Notez bien que cette initiative est un droit reconnu par la constitution de la transition qui garantit le droit d'association, de manifestation, de pétition et surtout de contrôle des gouvernants par les gouvernés.

C'est fort de ces garanties constitutionnelles que nous avons commencé à appeler, via les médias, les Congolais à se prendre en charge, à se concerter, à réfléchir et à exercer librement leurs prérogatives face au partage du pouvoir auquel se livraient les différents protagonistes. Car la crainte vivace était que le partage du gâteau prenne le pas sur les nobles résolutions du Dialogue Intercongolais et que celles-ci restent lettres mortes comme celles de la Conférence Nationale Souveraine en 1992.

Motivation politique ? Pourquoi pas ? N'aurions-nous pas le droit, en tant que fils du pays et en tant que Serviteur de Dieu, donc serviteur du peuple, de chercher le bonheur de ce dernier injustement maintenu sous le joug des politiciens mal intentionnés? Si c'est cela la motivation politique, nous sommes preneurs d'une telle conception. La RDC a aujourd'hui besoin d'hommes comme Elie qui disait au Roi : « Pourquoi troubles-tu Israël ? » ; ou comme Jean – Baptiste qui reprochait au Roi ses mœurs immorales indignes pour un leader politique; ou comme Martin LUTHER KING qui organisait de grandes manifestations politiques aux USA ; ou encore comme Desmond TUTU qui s'est courageusement élevé contre le politique scandaleuse de l'apartheid en Afrique du sud. Laissez-moi vous rappeler que les deux derniers ont été Prix Nobel de la paix.

Certains Hommes de Dieu congolais ne veulent pas jouer leur rôle de protecteur des faibles en ne remplissant que leur mission christologique: sauver les âmes. Mais les serviteurs de Dieu que j'ai cités avaient conscience que cette mission devait être dédoublée d'une autre : la mission prophétique qui consiste à surveiller, reprendre, censurer les injustices et dérapages provenant principalement des gouvernants.

Je suis personnellement prêt, en plus de ma mission christologique, à remplir ma mission prophétique en pesant de tout mon poids de serviteur de Dieu pour que l'Accord ne soit pas « exclusif ». Je veux dire qu'il ne faudrait pas que les textes et les institutions ne servent qu'aux dirigeants et pas au peuple qui risque d'être exclu du bénéfice de la fin de la guerre.

D'ailleurs, les Catholiques viennent, dans une certaine mesure, de nous emboîter le pas puisqu'au terme d'un atelier tenu à Kinshasa du 11 au 16 août dernier, ils ont préconisé la mise sur pieds de leur propre Observatoire pour la Transition dont le but est curieusement le même que celui de Sauvons Le Congo : veiller au respect du calendrier de fonctionnement des institutions, c'est-à-dire veiller à ce que toutes les institutions de la transition se conforment au respect strict de l'Accord global et inclusif ainsi que de la Constitution. Notez que parmi les 6 défis relevés par cet atelier, il y a la formation civique et politique et ils ont même adopté des « stratégies d'interventions concertées pour l'engagement socio-politique efficace des structures de l'Eglise catholique… ». Mais eux, on les a laissé réfléchir tranquillement, sans les soupçonner de subversion ni les agresser…

Congo Vision : Quelle est la nature des problèmes qui vous opposent au gouvernement congolais ?

Pasteur Kutino : En fait, il n'existe pas de différend entre KUTINO et le gouvernement congolais, mais bien entre Sauvons Le Congo et les pilleurs et brigands œuvrant en RDC.
Ces nostalgiques de la dictature veulent profiter de l'ignorance et de la bienveillance du peuple ainsi que de l'amateurisme d'une partie de la classe politique sans base et sans référence valable pour s'approprier  le Congo. Avec ces pilleurs et brigands, tout nous oppose car ils ont des buts précis : piller, massacrer, détruire.

Comment comprendre que pendant que les anciens belligérants siègent au sommet de l'Etat, des Congolais continuent d'être massacrés dans plusieurs portions du territoire ? Et comment comprendre qu'au moment ou des Congolais venus de milieux, de professions, de confessions les plus divers se réunissent pour réfléchir sur leur destin commun au sein d'un mouvement, qu'ils soient sauvagement tabassés, que leurs biens leur soient arrachés… Si Sauvons Le Congo était un mouvement subversif, quel besoin avions-nous de le rendre public ?

Cette réaction inattendue et totalement anticonstitutionnelle de l'autorité de l'époque prouve que seuls les pêcheurs en eau trouble se sont sentis morveux et se sont bruyamment et salement mouchés.
Certes, les services de l'ordre ont été détournés de leur mission, mais ce ne sont pas eux les ennemis de KUTINO ni de Sauvons Le Congo, mais bien ceux qui tirent les ficelles de la pauvreté, du désordre, de la guerre et qui sont les pesanteurs de la transition.

Ces hommes sans foi ni loi sont ceux qui ont commandité mon passage à tabac dans la brousse de Maluku et surtout qui ont porté atteinte à la chaîne chrétienne Radio-Télévision Message de Vie. Cette chaîne est le tout premier media télévisé chrétien à avoir existé en RDC. Elle a engagé des jeunes, elle a contribué à l'éducation, à la formation et à l'information des masses populaires et est le seul a avoir fait l'objet d'un pillage en règle sous les règnes des KABILA père et fils : ordinateurs, caméras, magnétos, micros, meubles, etc., tout a été emporté....

Ces mêmes ennemis du peuple ont permis que l'église dont je suis le responsable, Armée de Victoire, soit investie, pillée et transformée en maison close pour la satisfaction des bas instincts de quelques policiers mal payés et mal encadrés. Avec comme conséquence que la malédiction qui devait tout naturellement tomber sur les commanditaires de cette razzia va malheureusement s'étendre à ces hommes en uniformes qui ne sont que des exécutants.

Le plus curieux est que ni les services spéciaux ni le Parquet ne portent officiellement de charge contre moi ou contre Sauvons Le Congo. Seul l'Hôtel de ville, un organe administratif, s'évertue à jouer partialement au rôle de juge et de procureur…

Congo Vision : Une certaine presse nationale affirme que vous êtes criblé de dettes. Votre incapacité à honorer vos engagements serait la raison profonde de votre fuite en Europe. Que répondez-vous à cette presse?

Pasteur Kutino : [Rires] KUTINO Fernando criblé de dettes ? C'est comme si vous disiez que mon Seigneur Jésus-Christ est criblé de dettes !
A quelle presse faites-vous allusion ?   Peut-être à celle inféodée à l'ancien gouvernement, alimentaire, sans déontologie, sans conscience et sans scrupule. Parlons plutôt des organes qui font la fierté de la RDC comme Le Phare ou Le Potentiel, ou des sites sérieux comme allafrica.com.

Je suis l'Archevêque de plusieurs églises dans le monde, et à Kinshasa, en plus des extensions, je suis à la tête de l'une des plus grandes églises de réveil de la RDC. J'ai des amis à travers le monde qui n'hésiteraient pas de m'aider si j'avais des problèmes d'argent. En ce moment, nous sommes en passe de construire le plus grand temple jamais réalisé en RDC grâce notamment à des financements américains.

La thèse que vous évoquez est savamment distillée par ceux-là qui ne veulent pas que je contribue au réveil de la conscience congolaise. Mes prétendues dettes justifient-elles que des innocents aient été sauvagement agressés et soient privés de la liberté de culte ? Une partie de la réalité, que les pilleurs et brigands de la RDC n'aiment pas voir, est accessible sur les sites suivants:
http://www.congovision.com/massacres_files/frame.htm et aussi http://www.kutino.org/congo/ituri.html .

Les photos et les images nous obligent à ne pas oublier et à honorer la mémoire de près de trois millions de victimes générées par cette guerre. Car pour nous, paix et réconciliation ne signifient pas jeter aux oubliettes tous les génocides et crimes contre l'humanité commis par les anciens belligérants qui occupent maintenant de hauts postes politiques et dont certains se promènent aujourd'hui entourés de gardes du corps au frais de la communauté internationale.

C'est ici le lieu d'en appeler à la mise sur pieds d'un Tribunal Pénal International pour la RDC qui serait compétent pour juger les crimes commis en RDC depuis 1996, début de la rébellion afdélienne. D'ailleurs, Sauvons Le Congo / Suisse prépare déjà un dossier à déposer à La Haye, siège de la Cour Pénale Internationale.

Dieu nous enseigne que chaque chose a une fin et l'impunité en a une… Donc, mon exil en Europe est involontaire, même si je le mets à profit pour étendre le mouvement. Il n'est nullement question de fuir d'éventuels créanciers, comme l'affirme une presse en mal de sensation ; mais plutôt de défendre le seul et unique vrai créancier de la RDC : le peuple congolais. Et si j'étais réellement le débiteur de quelqu'un, ne saisirait-il pas les juridictions compétentes pour rentrer dans ses droits ? Soyons sérieux : mon créancier me ferait-il tabasser comme un vulgaire voleur, s'en prendrait-il à des fidèles innocents pour les priver du droit de prier ? Cette thèse de dettes dont je serais criblé est bonne à servir aux naïfs qui heureusement sont de moins en moins nombreux en RDC, après 13 ans de transition…

Congo Vision : Une certaine opinion estime que l'opération « Sauvons Le Congo » ne serait qu'un écran de fumée destiné à préparer votre asile politique en Europe. Que dites-vous de cette affirmation ?

Pasteur Kutino : Asile politique ! Dieu m'en garde ! J'entends rentrer en RDC, et plus tôt que vous ne croyez ! Si je ne l'ai pas encore fait, c'est parce que ma présence ici en Europe, bien qu'involontaire, peut réellement servir à consolider le mouvement.

Pensez-vous que je laisserais mon ministère, mes fidèles, mes amitiés, mes opinions, mes convictions, ma vision, ma foi, à Kinshasa pour venir bâtir en Europe une copie en  sable ou en chiffon ? Non !

Je vous dis sincèrement que les sollicitations ne manquent pas. Tout m'a été proposé pour que j'arrête Sauvons Le Congo: sommes faramineuses d'argent, villas de rêve, habits de star, voitures de pacha, documents de résidence perpétuelle dans l'espace Schengen, etc.… Mais la voie de Dieu est la plus sûre.

Tantôt, l'on me dit criblé de dettes, tantôt l'on me prête l'intention de m'exiler en Europe. Que faut-il retenir ? Simplement ceci :

1° C'est ne rien connaître de notre combat de tout temps, à savoir le bonheur intégral de l'homme, pour lequel Jésus-Christ a donné Sa vie, et qui a toujours constitué notre leitmotiv, que de débiter des aberrations de ce type.

2° C'est faire injure à l'intelligence du peuple congolais qui a adhéré spontanément et très massivement à la vision de Sauvons Le Congo ; et surtout c'est là une marque de volonté de le chosifier davantage.

Congo Vision : Les problèmes que vous évoquez sont antérieurs à la formation du gouvernement d'union nationale (de transition). N'envisagez-vous pas de retourner en RDC maintenant ?

Pasteur Kutino : J'ai expressément répondu à cette question tout à l'heure, en disant que nous nous sommes félicités de la signature de l'Accord ainsi que de la promulgation de la Constitution. Bien sûr, nous émettons des doutes sur la volonté sincères des uns et des autres de les voir les appliquer. Je meurs d'envie de retourner dans mon pays. Mais convenez qu'il faut un minimum de conditions, que nous nous attelons à mettre en place.
Mais croyez-moi, je rentrerai bientôt.

Congo Vision : L'opération "Sauvons Le Congo" a été récupérée par quelques partis politiques. Est-ce que cela vous dérange ou vous arrange?

Pasteur Kutino : Sauvons Le Congo n'a jamais été récupéré par qui que ce soit ! Nous avons dit : « Sauvons Le Congo », à la première personne du pluriel. Que des partis politiques, qui sont des composantes de la société congolaise, y adhèrent n'est pas la récupération, et cela ne nous dérange nullement. Bien au contraire ! je vous informe que je suis en contact régulier avec plusieurs responsables politiques qui m'appellent pour des échanges. Tout en restant fidèles à leurs convictions idéologiques et politiques, ils ont en plus voulu faire partie, de près ou de loin, d'un groupe de pression parce qu'ils craignent, eux aussi, d'être les laissés – pour - compte de la transition.

A dire vrai, nous savions dès le départ que Sauvons Le Congo serait approché par les politiciens. Ces derniers sont venus participer aux réunions de réflexion dès lors qu'ils se sont rendus compte de la popularité du mouvement. Mais avions-nous le droit de les écarter ? Je ne pense pas. Il fallait plutôt laisser le mouvement jouer le rôle de canalisateur des pensées, des énergies et des revendications. Sans doute se cachaient-ils parmi eux des loups, mais vous pouvez être certain que nous n'entendions pas leur laisser l'occasion de se servir du mouvement comme d'un marchepied.

N'a-t-on pas vu des politiciens aux côtés d'un Martin Luther King ? Ou de l'abbé Pierre en France ? C'était pour une cause spécifique et cela ne signifiait pas que ces hommes politiques avaient abandonné leurs convictions ou leurs partis politiques

Congo Vision : Pendant le régime du Président Mobutu vous avez été arrêté pour trafic d'armes. Comment s'est fait la transition jusqu'à votre statut actuel ?


Pasteur Kutino : La juridiction militaire devant laquelle le pouvoir de cette époque-là me poursuivait existe encore. Comme vous le savez, je n'ai jamais fait l'objet d'une condamnation officielle dans ce dossier.

Ils m'ont plutôt reproché d'utiliser des hommes en uniforme comme gardes du corps ; ce qui, bien sûr, était faux. Néanmoins, je suis resté 8 mois en prison, ce qui ne correspond guère à la sanction prévue pour une infraction aussi grave que celle relative au trafic d'armes.
Vous n'aurez aucun mal à comprendre qu'il s'agissait d'une de ces machinations dont le régime dictatorial de Mobutu avait le secret.
Et après ces 8 mois de prison,  ce même pouvoir me libérera en catimini, sans la même publicité ni le même bruit que lors de mon incarcération.

Congo Vision : Est - ce que la politique vous tente?

Pasteur Kutino : Si par politique, vous entendez l'art de gérer la Cité ainsi que la Res Publica, c'est-à-dire la chose publique ; alors, oui, je suis très intéressé. Le Chrétien doit apprendre à gouverner, à bien gérer la Cité et la chose publique. La Bible nous recommande de  rechercher le bien du pays dans lequel nous vivons, car notre bonheur en dépend (Jérémie 29 : 7).

Seulement, après 13 ans de transition, 7 ans de guerre – cette dernière a en réalité débuté en octobre 1996 avec la rébellion afdélienne – et près de 3 millions de victimes, nous ne laisserons plus les politiciens jouer au football seuls. Nous avons remarqué qu'ils bafouent volontairement les règles du jeu, se moquent éperdument de l'arbitre – qui est le peuple – et tirent sciemment à côté du but même lorsque ce dernier est vide ! Il leur arrive même de faire jouer des étrangers non homologués ni par la fédération nationale de football ni par l'arbitre…[Rires].

Seulement, cette fois-ci, tous les Chrétiens iront au stade pour les obliger à respecter les règles du jeu. C'est pourquoi je lance un appel solennel à tous les Hommes de Dieu congolais se trouvant non seulement en RDC mais aussi à l'étranger : il faut parler de la transition et de l'avenir du pays dans les prédications, les séminaires, les ateliers, les campagnes d'évangélisation. Les politiciens se sentiront alors mieux surveiller et rapprocheront leurs actes des intérêts du peuple.

Bien entendu, la politique, c'est aussi s'allier aveuglément aux thèses et aux actions de ceux qui n'ont qu'un objectif : se refaire une virginité politique grâce à la transition et se retaper une santé financière sur le dos du peuple. Hélas ! Certains Hommes de Dieu congolais se sentent à l'aise dans ce rôle de Judas, moyennant argent ou poste politique. C'est vraiment dommage.

Congo Vision : Quelle est votre évaluation de l'opération "Sauvons Le Congo"?

Pasteur Kutino : L'opération « Sauvons Le Congo » se porte bien. Elle emporte une forte adhésion populaire tant en RDC que dans la diaspora. Certes, en RDC, le mouvement a été ralenti. Mais le nouveau contexte politique plaide en notre faveur. Il faudra bien qu'on nous laisse fonctionner, tôt ou tard. Sachez qu'á Kinshasa comme ailleurs, des membres tiennent des réunions.

Le succès a valu les ennuis que vous connaissez au mouvement. Mais nous ne nous limitons pas à l'applaudimètre. Nous travaillons à consolider ses bases en dehors de la RDC pour créer une forte synergie entre les pôles intérieur et extérieur. Notre souhait le plus cher est que Sauvons Le Congo reste le cadre permanent où le peuple exprime ses aspirations. Ce qui n'est pas toujours évident ! mais nous y arriverons.

Congo Vision : Quel avenir présager pour "Sauvons Le Congo"?

Pasteur Kutino : Je le confonds à l'avenir de la RDC. Il est en rose, tout en rose. Il n'y a aucune raison pour qu'il n'en soit pas ainsi.
Puisque c'est une inspiration de DIEU…

Congo Vision : KUTINO, est-ce un opportuniste ou un pragmatique ?

Pasteur Kutino : Opportuniste ? Certainement pas. Comme beaucoup d'Hommes de Dieu congolais, j'ai simplement tenu un discours qui exprimait des désirs cachés, des espoirs tenaces. Ce que j'ai dit était relaté tous les jours dans tous les journaux. J'y ai ajouté la dimension spirituelle, en parlant avec foi. Et le peuple m'a compris.

Je me suis plutôt montrer pragmatique, en adoptant un thème rassembleur et en faisant fi des distances sociales, idéologiques, confessionnelles ou même tribales. Le résultat est que par rapport à la masse que constitue Sauvons Le Congo, les fidèles de l'église dont je suis le responsable, Armée de Victoire, ne sont qu'une petite partie. Donc, tout le monde se sent concerné, peu importe la personne de KUTINO.

Congo Vision : Votre mot de la fin?

Pasteur Kutino : Le mot de la fin, c'est un appel à tous les Congolais de bonne volonté, épris de paix, de justice et d'équité, à se pencher davantage sur le drame que vit notre pays la RDC, pour qu'une solution définitive soit trouvée.

Des élections sont nécessaires en RDC pour quitter le stade de l'intérimaire. Car depuis des lustres, plus personne n'a eu un mandat électif en RDC, mais tout le monde parle au nom du peuple : ce sont tous des intérimaires, du plus grand au plus petit ! Certes, dans le contexte mental et psychologique africain, les élections ne sont pas la panacée puisqu'un groupe peut toujours en contester le verdict, quand bien même elles auraient été libres et transparentes. Mais les élections demeurent un bon thermomètre de la vie démocratique dans un Etat qui cherche la respectabilité.

L'Occident gagnerait à garantir la stabilité économique, politique et sociale de la RDC. Dépassons tous le cadre des intérêts égoïstes et immédiats pour voir les vrais enjeux de la paix et de la stabilité régionales. Ensemble, c'est possible !

Et je dis au Congolais :
Peuple congolais, lève-toi, car cette affaire te concerne. C'est maintenant ou jamais ; la trompette de Jésus – Christ a sonné, c'est l'heure de la réflexion, mais surtout des décisions, de l'action, des conquêtes et des exploits. Des temps nouveaux commencent avec le Congo pour les Congolais.

La RDC, notre héritage, est une richesse et une couronne de gloire pour tout Congolais. La RDC est une nation prophétique et non une charogne que viendraient se partager des hyènes insatiables ni une prostituée à la merci des pulsions malsaines d'un quelconque obsédé.

Tous, rejoignez Sauvons Le Congo !

VICTOIRE AU PEUPLE.

Interview réalisée par Sylvestre Ngoma et Macaire Munzele, Congo Vision .

24 septembre 2003

 

 
 
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