Une approche génétique pour la fin à l'impunité à l'est du Congo
(USA, 17/3/09) -- La guerre à l'est du pays pourra finir un jour mais elle aura laissé des traces et des traumas indélébiles à tout notre peuple mais surtout aux victimes de violences sexuelles. Ne pas en tirer les leçons et ne pas mettre en place des dispositions utiles pour éviter une re-édition de ce genre de violence au nom de la paix « retrouvée » seraient inconséquent et irresponsable.
De milliers de filles et femmes victimes de violences sexuelles indescriptibles à l'est du pays ont droit à la justice. Elles seraient soulagées tant soit peu de voir certains (si pas tous) de leurs assaillants répondre de leurs crimes. Si le gouvernement congolais et la communauté internationale tiennent à décourager le genre de violence sexuelle inouïe utilisée comme arme de guerre pendant la période de conflit, ils doivent s'investir à trouver les moyens et les stratégies pour punir les auteurs de cette violence.
Une des solutions serait la création d'une banque nationale de données génétiques, permettant d'emmagasiner l'ADN de soldats et miliciens impliqués dans ce conflit et que l'on pourra utiliser pour régler les cas de paternité des enfants nés de viol. Il faudra donc soumettre tous les hommes en armes qui ont combattu à l'est du pays (FARDC, maï-maï, anciens rebelles du CNDP, miliciens de FDLR arrêtés, de PARECO, etc). aux prélèvements d'ADN pour analyse génétique. Les enfants nés de viol seraient aussi soumis aux mêmes prélèvements avec le consentement de leurs parents.
Le parlement congolais est donc appelé à voter un projet de loi permettant aux instances autorisées d'émettre des mandats pour le prélèvement forcé d'échantillons de sang, de cheveux ou de salive chez les hommes en armes au Nord et au Sud Kivu, ce qui sera utilisé pour des analyses génétiques. Car les preuves par l'ADN sont irréfutablement incontestables pour prouver la culpabilité des auteurs de cas d'agression sexuelle. Les « matchs » d'ADN prouveraient sans faille les liens de paternité. Il serait donc facile d'établir quel homme a violé quelle femme ou quelle fille.
Si une telle mesure est adoptée, certains hommes en uniforme quitteront d'eux-mêmes l'armée par crainte de se faire arrêtés.
Le gouvernement serait donc tenu d'exclure les coupables ainsi reconnus de l'armée nationale et de les punir avec la rigueur de la loi. Aux Etats-Unis où les analyses génétiques se pratiquent, plusieurs crimes sexuels se résolvent même après plusieurs années. Pour l'est de notre pays, puisqu'il n'a pas été possible de préserver la semence masculine après chaque cas de viol, il est recommandé de se contenter seulement des associations génétiques entre père et enfant. Il est vrai qu'il y a eu de cas d'agression sexuelle qui n'ont pas engendré d'enfants ; pour ces cas-là, il y aurait peut-être d'autres moyens pour punir les auteurs.
Le gouvernement congolais principalement doit investir des moyens conséquents pour l'acquisition de la technologie d'ADN et la formation des experts pour sa manipulation. Car si les criminels sexuels qui font aujourd'hui partie de l'armée nationale ne sont pas punis, ils récidiveront et le cycle de violence continuera vicieusement à l'est du pays. Au fait, les conséquences de l'impunité seraient plus coûteuses (et même incalculables) pour la République Démocratique du Congo que le coût d'un investissement en équipements de prélèvements et d'analyse d'ADN.
La communauté internationale et l'ONU ont promis « d'aider autant que possible la RDC dans la lutte contre les violences sexuelles ». Une manière pratique et efficace de le faire est d'investir les moyens financiers et matériels pour l'acquisition de la technologie d'ADN par la République Démocratique du Congo en vue de rendre justice à ces femmes congolaises qui ont souffert et continuent toujours de souffrir d'abus abominables. Car comme le disait le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon : « La violence contre les femmes est une attaque contre nous tous, contre les fondations de notre civilisation ». Ban Ki-moon qui s'oppose à l'intégration des miliciens responsables de violence sexuelle dans l'armée ne doit donc que soutenir une telle initiative.
L'utilisation de preuves par l'ADN couperait court à toute spéculation sur la validité des conclusions d'enquête sur les responsabilités des uns et des autres. La communauté internationale doit donc être associée pour garantir l'indépendance, l'expertise scientifique et professionnelle de ces opérations. Les autorités congolaises doivent faire preuve de volonté politique pour mettre fin à la culture d'impunité et d'entreprendre des actions pratiques contre l es violences sexuelles à l'Est du Congo .
Enfin, le Secrétaire général de l'ONU ne disait-il pas que : « la principale arme pour combattre la violence sexuelle est la volonté politique d'un leader » ?
A bon entendeur, salut !
Sylvestre Ngoma
Congo Vision
© Congo Vision